Royaume-Uni ou « la lente crevaison d’un pneu »

27 mai 2024
-IAM, News

Hugues Chevalier, Economist

Après une récession au deuxième semestre de l’année dernière, la croissance économique au Royaume-Uni a enfin progressé au 1er trimestre de cette année à 0.6% (t/t) dépassant les prévisions. Ce redressement est tiré principalement par la consommation des ménages, dont les revenus disponibles réels ont augmenté parallèlement au recul de l’inflation. Cette dernière ressort quand même encore en hausse de 3.2% sur un an. Toutefois, cette embellie conjoncturelle masque une situation structurelle catastrophique. En effet, les conséquences du Brexit continuent de pénaliser l’ensemble de l’économie britannique. Et, cerise sur le gâteau, les autorités britanniques ont introduit le 30 avril dernier le contrôle physique des importations de produits agricoles ou alimentaires de l’Union Européenne. Cette nouvelle règle va coûter plus de 330 millions de livres supplémentaires aux entreprises. Le rappel des conséquences économiques du Brexit est édifiant et devrait encore peser sur la croissance britannique pendant plusieurs années. En effet, fin 2023, le niveau du commerce extérieur britannique (exportations et importations) était de 10% inférieur à celui de 2019, alors que celui des autres pays du G7 était de 5% supérieur à celui de 2019. La différence est donc de 15 points et « l’Office for Budget Responsibility (OBR)» souligne l’évidence, à savoir que « l’intensité commerciale du Royaume-Uni ne s’est pas redressée au même rythme que les autres pays du G7 ». Et la baisse n’est pas limitée avec l’Union Européenne, mais avec l’ensemble de ses partenaires commerciaux, notamment au travers des effets indirects des chaînes logistiques que personne, évidemment, n’avait anticipé. Les investissements ont chuté et la main d’œuvre européenne a quitté le pays, remplacée par une immigration massive des pays du sud asiatique, avec un recul de la productivité du travail. Le Brexit est d’ailleurs un cas d’école sur le plan économique des conséquences négatives de l’érection de barrières commerciales avec son principal partenaire commercial (plus de 50% des échanges). Selon l’économiste Emily Fry « c’est exactement ce qu’on pouvait attendre d’une économie qui s’adapte à de nouvelles barrières commerciales : une perte de dynamisme, comme la crevaison lente d’un pneu ».  Et le pneu n’est apparemment pas encore à plat à l’observation du commerce extérieur et des investissements.

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