12 avril 2022 -IAM, News
Hugues Chevalier, Economist
La récente flambée des cours des matières premières, suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, tombe au plus mal alors que les économies ont été déjà durement touchées par la crise du Covid et par des pressions inflationnistes liées au chaos dans les transports et à la désorganisation de la production. Les prix de l’énergie et des matières alimentaires ont explosé suite l’arrêt de tous les flux logistiques depuis le mer Noire, ce qui démontre le poids stratégique de la Russie et de l’Ukraine dans la production et l’exportation de ces commodités. Ainsi, par exemple, la Russie est le premier exportateur mondial de blé. De plus, dans le secteur des matières alimentaires, les plus gros exportateurs d’engrais, comme la Chine et la Russie, ont également stoppé leurs exportations, ce qui pourrait pénaliser les pays producteurs de céréales et d’oléagineux, comme la France, avec des rendements qui pourraient baisser de 25%. Se rajoute à cela, le prix du gaz qui a décuplé depuis 1 an et qui représente 90% du coût des engrais azotés. Au total, le prix des engrais azotés a augmenté de 300%, ce qui va se traduire également dans les prix des céréales. Enfin, les incertitudes demeurent totales sur les volumes de la campagne 2022 en raison de la guerre. Mais déjà, la récente hausse des prix provoque des remous chez les importateurs du sud de la Méditerranée. Ainsi, par exemple, l’Egypte, dont 80% des importations proviennent de la mer Noire, a besoin de 10 millions de tonnes de blé par an pour fournir du pain subventionné à 72 millions de personnes. La flambée des prix des matières alimentaires (+75% pour le blé en deux semaines) a forcé le gouvernement à solliciter une nouvelle aide du FMI et de l’UE. Par ailleurs, suite à l’accélération de l’inflation, la banque centrale a remonté ses taux d’intérêt, ce qui va pénaliser la croissance économique. Les craintes, comme dans les pays voisins, sont de nouvelles tensions sociales et des émeutes, comme celles du pain en 1977.