L’Allemagne souffre-t-elle du Covid long ?

09 septembre 2024
-IAM, News

Hugues Chevalier, Economist

Depuis 2021, l’économie allemande sous-performe face à celles des autres pays européens. En effet, la croissance stagne outre-Rhin, alors qu’elle progresse dans l’ensemble de la zone euro. Cette situation est due tant à des facteurs conjoncturels que structurels. D’abord, la consommation réelle des ménages n’a pas progressé depuis 2019 en raison d’un recul des revenus réels des ménages. La crise inflationniste, suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, en est la cause. Par ailleurs, les Allemands ont accru leur épargne, pénalisant ainsi les dépenses de consommation. Ensuite, toujours en conséquence de l’inflation liée à la guerre en Ukraine, les investissements stagnent du fait de la hausse des taux d’intérêt de la Banque centrale européenne, ce qui a, en particulier, pénalisé le secteur de l’immobilier résidentiel. Ainsi, les investissements dans le secteur de la construction ont reculé de 5% depuis 2022. Toujours à la suite de l’invasion russe, la production industrielle a été très affectée par l’augmentation des prix de l’énergie. A titre d’exemple, dans le secteur de la chimie, très gourmand en énergie, le niveau de production reste encore inférieur de 20% à celui du début 2022. Sur le plan structurel, la stagnation des exportations est un autre facteur de la morosité de l’économie outre-Rhin. En effet, les problèmes économiques du premier client, la Chine, et une productivité en berne ont pénalisé le commerce extérieur de sorte que l’Allemagne a perdu des parts de marché mondiales. Enfin, comme en Suisse, les règles sur les déficits des finances publiques n’ont pas permis au gouvernement allemand de soutenir l’activité des entreprises et la consommation des ménages autant que dans les autres pays européens (France, Royaume-Uni, etc). Ainsi le déficit public en 2024 ressortirait à 1.6% du PIB, contre près de 5% en France et en Italie. La contrepartie de ces règles sur les déficits publics est une dette publique maitrisée à 63% du PIB, contre 112% en France ou près de 140% en Italie. Si à moyen terme la maîtrise des déficits est un atout, à court terme, cela amplifie la stagnation de la croissance et de la consommation. Cette morosité outre-Rhin se traduit par des votes contestataires comme ce fut le cas ce week-end en Allemagne de l’Est dans les élections régionales. Le gouvernement du Chancelier Scholz doit donc s’atteler immédiatement à une relance économique pour éviter une stagnation durable.

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